Le sachez tu !? :o Chronique étymologique et culturelle par Laurence Chalon

Le sachez tu !? :o Petite chronique étymologique et culturelle par Laurence Chalon

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jeudi 5 mai 2022

Le Sachez Tu !? 😮 Angoisse, angine, étrangler, strangulation, angle...

 Le Sachez Tu !?

😮 Angoisse,
angine, étrangler, strangulation, angle...(il y en sûrement d'autres) :
quel est le lien étymologique entre ces mots ?
On y reconnait la racine latine d'un verbe latin signifiant (re)serrer : ango, angere, dont le parfait est "anxī", une forme qui a aussi donné anxieux.
Effectivement, l'angoisse, l'anxiété, tout comme l'angine, donnent cette impression d'avoir la "gorge serrée".
En grec, ἄγχω, ankhô signifie aussi (com)presser.
Ces mots viennent de l'indo européen henǵh signifiant serrer, qui a donné Angst en allemand, (peur) ou anger en anglais (colère)
Ci-dessous :
pour illustrer l'angoisse,
Le Désespéré 1843 ou l'autoportrait de Courbet à 25 ans
Gustave Courbet (Ornans 1819 -Suisse 1877).
Courbet tenait beaucoup à cette toile puisque, malade et exilé, il l'emmena avec lui en Suisse en 1873.
En effet Courbet avait été condamné, assez injustement, en 1871, à six mois de prison fermes, 6 850 francs de frais de procédure, à 500 francs d'amende et enfin à l'exil, pour avoir provoqué, comme membre de la Commune, la destruction de la colonne Vendôme commémorant la victoire napoléonienne d'Austerlitz.
En réalité, il n'avait participé qu'à une pétition qui proposait de déplacer la colonne Vendôme aux Invalide.
Et il faut se souvenir, qu'une révolution chassant l'autre, la statue équestre de Louis XIV sur la place Vendôme, avait été détruite en 1792.
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Baguenauder

 Le Sachez tu !?

😮 Baguenauder :
ce verbe un peu désuet, signifiant flâner sans but précis, musarder, batifoler, gambader, s'amuser de choses vaines et puériles, vient en fait des étranges petits fruits translucides, ou "baguenaudes" de ce que l'on appelle également l'arbre à vessie.
En effet, les enfants aimaient à faire éclater frivolement et à faire claquer ces petites gousses gonflés d'air.
En 1980, dans la publicité télévisée pour le fromage "Belle des champs", Richard Gotainer avait écrit ces jolis vers sonores :
Tu baguenaudes dans les pâturages
Tu t'en vas te promener, Belle des champs
Qu'il est blanc, qu'il est crémeux ton fromage
Dis, donne-nous en un peu, Belle des champs
Tu joues de l'échancrure de ton corsage
Des étincelles dans les yeux, Belle des champs
Ta coquetterie nous pousse au badinage
Nous sommes tout pantelants, Belle des champs
(Voilà, 😉 maintenant, vous l'avez pour toute la journée dans la tête, alors que vous pourrez toujours chercher dans les rayons ce fromage dont la production a disparu dans les années 90)
Le mot baguenaude vient du latin baca, baies et il est construit sur le modèle de "chique-naude".
batifoler vient de l’italien battifolle désignant un rempart, un boulevard, où les jeunes gens allaient s’amuser, du bas latin batifollum : bastion.
Flâner, lui vient du verbe normand flan(n)er, passé en français au XIXe siècle, lui même issu du norrois flana (marcher, se précipiter étourdiment) et du norvégien "flana" (se promener).
Ci-dessous :
pour illustrer baguenauder et flâner
de Henri Martin, né à Toulouse en 1860 et mort à Labastide-du-Vert en 1943.
"Les Bords de la Garonne", ou
"Les promeneurs ou Les rêveurs"
collection du Capitole de Toulouse
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Le Sachez Tu !? 😮 Tergiverser :

 Le Sachez Tu !?

😮 Tergiverser :
signifie, aujourd'hui, prendre des faux-fuyants, éluder une décision, éviter de donner une réponse...
Mais saviez vous que tergiverser vient du verbe latin tergiversor, signifiant tourner le dos, et donc fuir.
On peut décomposer tergiversor en : tergum (dos) + versor (tourner) issu du verbe vertere, qui a aussi donné vertèbre.
Quand on se retourne, et qu'on montre son dos, c'est que l'on prend la fuite
Ci-dessous :
pour illustrer une fuite célèbre,
Évariste-Vital Luminais (1821-1896)
"La Fuite de Gradlon"
La Légende de la cité d’Ys est l’un des plus anciens chants bretons illustrant la christianisation de l’Armorique.
Le roi Gradlon offrit à Dahut, sa fille chérie, la ville d’Ys, située sous le niveau de la mer et protégée des marées par de fortes murailles.
Mais Dahut en fit une ville de débauches, changeant chaque soir d’amant et le sacrifiant à l'aurore.
Un soir, le Diable, envoyé par Dieu pour la punir, se présenta pour la séduire et lui vola les clefs des écluses.
Alors, l’eau s’engouffra et engloutit la ville d'Ys.
Gradlon prit alors sa fille en croupe, tenta de fuir et de rejoindre le continent, mais une force inconnue retint sa monture.
Gradlon ne s’en libérera que lorsque, sur ordre de Saint-Guénolé, il rejeta sa fille pécheresse à l’eau où elle se noya.
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mercredi 27 avril 2022

Le sachez tu !? :O Duralex sed Durex ;)

 

Le Sachez Tu !? 😮 Durex :
vous connaissez certainement cette fameuse marque de préservatifs ?
Duralex : vous connaissez, aussi, peut-être, (les arts de la table ayant moins de notoriété 😉 ) cette marque de vaisselle en verre quasi incassable.
Mais, aviez vous remarqué que, mis bout à bout, les noms de ces deux marques forment (presque) la locution latine :
"Dura Lex, sed Lex" : dure (est la) loi, mais (c'est la) loi" ?
L. Jackson fonde la London Rubber Company en 1915 et vend des préservatifs et accessoires importés pour les coiffeurs, et, en 1929, il dépose le nom de marque Durex pour ses préservatifs.
Duralex, elle, est une ligne de vaisselle en verre trempé, produite à La Chapelle Saint Mesmin, dans la banlieue d'Orléans, depuis 1945.
Attention, il ne faut pas se tromper de marque, l'utilisation d'un verre incassable dans certaines circonstances peut se révéler particulièrement inadaptée...
Lorsque vous étiez petits, à la cantine, vous vous êtes sûrement amusés à comparer les chiffres sibyllins inscrits au fond de votre verre Duralex (si, si, je vous imagine très bien, vous et vos petits copains de CM1, louchant tous au fond de votre verre vide 😉 )
Ce numéro, qui nous paraissait ésotérique, permettait simplement de remonter la chaine de fabrication, en cas de défaut, et correspondait au numéro du moule...
Désolée d'avoir cassé le mythe...
L'histoire se termine mal : la société Duralex, dure loi du marché, a été mise en liquidation judiciaire, comme beaucoup d'entreprises françaises, suite aux derniers confinements, et rachetée par International Cookware, possédant également Pyrex, et propriété du fonds d’investissement européen Kartesia.
Au dernières nouvelles, Cookware prévoyait de maintenir 246 emplois sur 248, seuls deux cadres dirigeants n’étant pas conservés.
Dura Lex, sed...et cætera desunt (etc) mot à mot :"et d'autres choses manquent'' ..
Ci dessous :
Pour illustrer la loi, parfois dure, et les (petits) voleurs ( et plutôt qu'un verre ou... autre chose 😉 ) :
Pieter Bruegel l'ancien peintre flamand (Brabançon,1525-Bruxelles,1569)
"Le paysan et le voleur de nid"
Un paysan débonnaire nous prend à parti et nous montre du doigt un enfant, qui grimpé dans un arbre, chaparde les oeufs.
Le paysan, souriant, semble nous dire : "il ne m'a pas vu, mais, quand il va descendre, il va m'entendre !"
Cependant, son sourire et son air patelin semble indiquer que la punition sera supportable, quoi qu'il tienne, dans la main, une pointe de bois effilée, arme improvisée, un petit couteau et une trompe à la ceinture.
Au loin, la ferme du paysan, ses gens, ses animaux, semblent nous indiquer qu'il est bien le propriétaire des lieux et agit en toute légitimité.
Un éclairage "fish eye" concentre un halo clair sur le paysan, alors que la verdure forme une zone plus sombre autour de lui, et le raccourci sur ses jambes donne une curieuse sensation visuelle, très moderne : comme si nous le regardions par dessus, à la loupe.
Pieter Bruegel l'ancien est le père de Pieter Brueghel le Jeune (1564-1637), mais également le père de Jan Brueghel l'Ancien (1568-1625) et le grand-père de Pieter Brueghel III (1589-1639) et de Jan Brueghel II le Jeune (1601-1678) : et oui, c'est compliqué...!
Huile sur bois
Kunsthistorisches Museum, Vienne
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mardi 26 avril 2022

Bedeau ou badaud ?

 Le Sachez Tu !?

😮 Bedeau
Mon colocataire 😉 m'a fait remarqué que j'avais du me tromper en écrivant "bedeau" au lieu de "badaud", mot signifiant flâneur s'attardant à regarder un spectacle de rue, issu du latin bado, je baille (aux corneilles..)
Or, non point, pour une fois je ne m'étais pas trompée ! 😉
J'ai bien voulu écrire "bedeau" désignant le laïque chargé de précéder le clergé dans les processions : de l'ancien français bede, lui même issu du vieux-francique bidil ou messager de justice.
Ceci dit, on peut être un bon bedeau mais faire le badaud, et baguenauder, au lieu de servir la messe...
Mais il est vrai que je fais beaucoup de lapsus, linguae et calami, de fautes de frappe, d'orthographe et d'étourderie et accepte volontiers les observations bienveillantes de mon colocataire (et de toute autre personne attentive d'ailleurs) 😉
ci-dessous :
François-Auguste BIARD
Lyon, 1799 – Samois-sur-Seine, 1882
Le Bedeau ivre
Sous la réprobation générale et le sourire moqueur des enfants de coeur, le bedeau, dans son bel habit rouge, couleur de la honte, gît à terre, ivre, les objets du culte (pain, encensoir) répandus autour de lui..
Certains se bouchent même le nez en signe de mépris...
Huile sur toile
54,5 x 65 cm Signé en bas à droite : Biard
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Le Sachez Tu !? 😮 Fakir, derviche et mesquin : pauvre

 Le Sachez Tu !?

😮 Fakir
En Europe, le mot "fakir" évoque un indien aux yeux fous, avalant des sabres et dormant sur une planche à clous, surtout si l'on est tintinophile (mot qui n'a rien à voir avec une petite cloche qui sonnerait dans la tête 😉 ).
Mais en hindi et en ourdou, fakir désigne essentiellement un mendiant :
le mot a voyagé depuis la Perse, en suivant le Gange avec les envahisseurs moghols et les Perses l'avaient eux-mêmes emprunté à l'arabe où il signifiait mendiant, de فقير faqīr issu de فقر faqr (pauvreté).
Fakir est donc à rapprocher du mot derviche, en persan درويش, derviš, (pauvre, mendiant) qui nous vient du turc derviş (mendiant) mais qui en français désigne plutôt une confrérie de soufistes qui atteignent l'extase mystique en tournant sur eux-mêmes.
Mesquin, avant de signifier en français médiocre, étroit d'esprit, signifiait également pauvre en arabe et nous est parvenu via de l’espagnol mezquino, issu de l’arabe مسكين, miskīn (pauvre), lui-même issu de l’akkadien 𒈦𒂗𒆕, muškēnu (celui qui se prosterne, se soumet)
Ci-dessous :
Simpson, William (1823-1899)
"The Hindu Fakir" 1867
Simpson a écrit à propos de ce portrait :
"Beaucoup étaient des ascètes sales, mais c'était un vieil homme propre et beau, avec un visage doux et des manières les plus courtoises.
Son nom était Mahant Gopal Dass, un Bairagi et il était disciple de Seeta.
Ses ustensiles pour ses besoins simples :
une gourde pour l'eau,
un plat de cuivre pour la nourriture,
une pipe avec un morceau de tissu au bout,
des pinces pour soulever les braises pour l'allumer, et une conque qu'il fait retentir lorsqu'il entre dans le temple.
Derrière lui, enduit de couleur rouge, se trouve une sculpture d'Hanuman, le dieu singe.
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dimanche 24 avril 2022

Arrogance, s'arroger, déroger, interroger et "Rogations" du latin rogo, rogare signifiant demander

 Le Sachez Tu !?

😮 Arrogance :
alors cette fois, celui qui trouve le lien étymologique entre : arrogance, s'arroger, déroger, interroger et surtout "Rogations", je lui tire mon chapeau ! 😉
Bon, en comparant ces mots, on observe une racine commune :
le verbe latin rogo, rogare signifiant demander, réclamer avec insistance, insister, re-vendiquer (le latin vindicta désignant la baguette servant à désigner l'objet de la revendication).
S'arroger est constitué de rogo + le préfixe, ad, devenu ar, et signifie "réclamer pour soi-même", s'attribuer (attribuer = une part sur trois de la prise effectuée).
L'arrogant, est du coup, au sens littéral, celui qui s'octroie une part d'office, celui qui réclame, revendique pour lui-même.
Les "rogations" ont la même origine : "rogo", ou supplication à Dieu, et désignaient des processions religieuses se déroulant les trois jours précédant le jeudi de l'Ascension, et dont le but était d'intercéder auprès de(s) Dieu(x) pour obtenir une bonne moisson.
Les litanies, ou prières psalmodiées durant la procession étaient apotropaïques (visant à conjurer le mauvais sort) et propitiatoires (visant à rendre propice la clémence divine).
Les rogations ont été instituées par l'église catholique en se calquant, pour la "phagocyter" sur la fête celte de Beltaine, fête de Bélénos, ("le brillant"), cérémonie se déroulant autour du premier mai et durant laquelle des feux étaient allumés par les druides, qui prononçaient des incantations.
Afin de le protéger des épidémies, on faisait passer le bétail entre ces feux.
Ci-dessous :
La Bénédiction des blés dans l'Artois à Courrieres
Jules Breton (1857)
Musée des Beaux-Arts d'Arras
Cette longue composition de 3,2 mètres, fait penser à l'enterrement à Ornans de Courbet, de 1850.
Au premier plan des paysans et des enfants endimanchés, prient et se signent, avec ferveur, au passage de cette sainte et longue procession qui doit bénir tous les champs.
Un groupe de jeunes premières communiantes, en blanc, transporte l'immaculée conception, qui fait office de mère nourricière.
Bedeaux et curés, bréviaires ouverts (du latin brevis, court) chantent des litanies et prononcent les prières, suivis de l'évêque, à la chasuble chamarrée, tenant "ostensiblement" un reliquaire ou un ostensoir, sous un dais rouge.
Les enfants de coeurs arborent cierges et un encensoir, censé purifier l'air.
Enfin, après le clergé viennent les laïques :
on reconnait le maire, ceint de son écharpe tricolore, les notables, et le garde champêtre, coiffé de son bicorne, empêchant les enfants de transgresser une ligne imaginaire.
Enfin, de façon très protocolaire, vient la foule sage des villageois, unie dans ce cortège rituel et solennel, cérémonie dont dépendent les récoltes...
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